Plusieurs études récentes jettent un froid sur le véritable état du marché du véhicule électrique en Europe.
Même si certains constructeurs font ponctuellement de grosses remises dans le sillage d’un mouvement de yoyo initié et perpétué par Tesla, ce qui pourrait laisser espérer un début de baisse massive des prix des voitures électriques, ces dernières sont encore loin d’être accessibles au commun des mortels.
En fait, davantage que le prix seul, c’est le rapport entre les contraintes, les bénéfices et les tarifs des voitures électriques qui pose souvent problème, et agit comme un frein à l’achat. Car plus que la somme en elle-même, c’est l’idée de devoir dépenser plus de 25 000 euros pour une voiture dont on sait que l’autonomie réelle atteindra difficilement les 300 km en conditions normales d’utilisation qui fait encore hésiter nombre de nos concitoyens.
Ce qui est parfaitement compréhensible, même si l’on sait désormais que la question de l’autonomie se pose avec moins d’acuité vu le développement très rapide des infrastructures de recharge, et vu aussi le fait que l’immense majorité des déplacements se compte seulement en quelques dizaines de kilomètres par semaine.
Les points de recharge peinent à suivre les vente de VE
Bref, la voiture électrique est encore un peu trop chère pour conquérir la majorité de la population. Et il se pourrait aussi que, malgré notre enthousiasme que d’aucuns qualifieraient de « rassuriste » au sujet de l’expansion massive des points de recharge, le sujet soit encore l’objet d’un certain scepticisme.
En tout cas au niveau européen. Car si dans certains pays, plutôt situés au nord, l’électrification va bon train, c’est une autre histoire dans les pays du sud ou de l’est. Plusieurs études récentes de l’ACEA (European Automobile Manufacturers’ Association) viennent confirmer que tout n’est pas si rose – ou vert – dans l’Union Européenne, et que la transition vers l’électromobilité reste pour beaucoup d’européens une question de pognon. Et, accessoirement, de recharge.
La première étude[1] pointe un décalage que nous constatons parfois à l’usage sans pour autant mesurer son ampleur. Ce décalage c’est celui entre la croissance des ventes de voitures électriques en Europe et la croissance des infrastructures de recharge. Et c’est plutôt abyssal.
Alors que la part de marché des nouveaux véhicules électriques continue de croître rapidement, le déploiement de l’infrastructure de recharge publique peine à suivre. Les chiffres parlent d’eux-même : entre 2016 et 2022, le nombre de voitures électriques en Europe a été multiplié par 17, de 118 542 en 2016 à 1 996 738 en 2022. Pendant ce temps, le nombre de bornes de recharge publiques dans l’UE n’a lui augmenté que de moins de 6 fois entre 2016 et 2022. Cela signifie que les ventes de voitures électriques ont augmenté presque trois fois plus rapidement que la construction de points de recharge. Si les pays du nord sont assez bien lotis, et que la France ne s’en sort pas trop mal,ce n’est pas exactement la même mayonnaise pour certains pays du sud, même si tous ne sont pas logés à la même enseigne, puisqu’on sait par exemple que le Portugal – certes moins étendu – est devant la France en nombre de points de recharge par 100 kilomètres. La palme revenant encore aux Pays-Bas et à l’Allemagne, qui à eux deux représentent la moitié du nombre total de points de charge publics dans l’Union Européenne.
La voiture électrique encore trop chère pour de nombreux européens
Une autre étude[2] vient compléter le sujet en mettant en corrélation le revenu moyen par pays et le pourcentage des immatriculations de voitures électriques. Là aussi la réalité est assez cruelle puisqu’elle indique que le taux d’adoption des véhicules électriques rechargeables semble fortement lié au revenu net annuel, démontrant que l’accessibilité est un facteur significatif décourageant les achats de véhicules électriques.
Les dernières données de l’ACEA révèlent que les voitures électriques et hybrides représentent 21,6% des nouvelles voitures immatriculées dans l’Union Européenne en 2022, mais n’ont qu’une part de marché de 9% ou moins dans plus de la moitié des États membres. Dans les pays où les VE et hybrides ont une part de marché de moins de 9%, tels que plusieurs pays d’Europe centrale, orientale et méridionale, tels que la Grèce, l’Italie, la Pologne et la Croatie, le revenu net annuel moyen est d’environ 13 000 € par salarié. Les parts de marché les plus élevées (plus de 30%) sont concentrées dans seulement cinq pays d’Europe du Nord et de l’Ouest, où le revenu net annuel dépasse 32 000 €. En Suède, où le revenu net annuel est supérieur à 35 000 €, plus de la moitié des voitures nouvellement immatriculées sont des voitures électriques ou hybrides. En revanche, elles ont une part de marché de seulement 4% en Bulgarie, où les revenus sont d’environ 7 000 €.
Les 5 pays avec la part la PLUS ÉLEVÉE de voitures électriques + revenu net annuel moyen :
- Suède: 56,1% – 35 486 €
- Danemark: 38,6% – 39 274 €
- Finlande: 37,6% – 33 155 €
- Pays-Bas: 34,5% – 40 312 €
- Allemagne: 31,4% – 32 850 €
Les 5 pays avec la part la PLUS FAIBLE de voitures électriques + revenu net annuel moyen :
- Slovaquie: 3,7% – 10 985 €
- République tchèque: 3,9% – 13 836 €
- Bulgarie: 4,0% – 7 272 €
- Pologne: 5,0% – 10 782 €
- Croatie: 5,0% – 10 391 €
On le voit, l’adoption de la voiture électrique est d’abord une histoire de niveau de vie, la question des infrastructures de recharge venant probablement au deuxième rang. Mais ce serait faire erreur que de distinguer ces deux motifs, car ils sont probablement très imbriqués dans l’esprit des consommateurs, comme indiqué en début de cet article. On accepte de payer plus cher si le service rendu est perçu comme vraiment meilleur et sans failles, et dans ce cas, dans notre psychologie de consommateur, la question du prix se pose avec moins de force. A l’inverse, le prix perçu est trop élevé quand en échange on reçoit un service jugé moins qualitatif, et surtout avec de nombreuses contraintes. C’est la raison pour laquelle la voiture électrique peut paraître coûteuse, au-delà de son vrai prix.
Il reste donc beaucoup de chemin à parcourir pour atteindre l’objectif fixé par l’UE de la fin de la vente des voitures thermiques en 2035, et certains pays partent encore de très loin.
L’industrie automobile européenne a investi considérablement dans la technologie des véhicules électriques. L’électrification est le moyen le plus efficace de minimiser l’empreinte carbone du transport routier, de réduire les émissions de polluants et d’améliorer la qualité de l’air, mais les problèmes d’accessibilité financière freinent cette transition indispensable.
Les décideurs doivent maintenant agir en établissant des conditions favorables globales. Accélérer l’installation de points de recharge pour les véhicules électriques à travers le continent, notamment dans les pays où l’infrastructure fait notablement défaut, est l’une de ces mesures. De plus, les incitations à l’achat, qui aident à atténuer les défis financiers auxquels sont confrontés les consommateurs européens, peuvent également stimuler davantage la transition de l’Europe vers un avenir à bilan carbone net nul.
Sources :
[1] Charging point deployment versus sales of electrically-chargeable cars – ACEA
[2] Affordability of electric cars: Correlation between market uptake and annual net income – ACEA
Ces sondages n’ont qu’un intérêt relatif. On demande à des personnes qui n’ont quasiment aucune expérience des véhicules électriques de dire si ils se voient passer à l’électrique. Que font les gens, ils projettent leur expérience des véhicules thermiques sur les véhicules électriques.
Par définition, les gens n’ayant pas de station essence chez eux, se pré-occupent de ne pas avoir à faire le plein tous les deux jours. Donc ils veulent de l’autonomie, et sans surprise ils veulent la même autonomie sur un véhicule électrique que ce qu’ils ont l’habitude d’avoir sur leur véhicule thermique. Ce qu’ils n’ont pas encore compris, c’est qu’avec un véhicule électrique, le plein est fait chaque nuit (j’admets que la grande majorité des acheteurs de VE actuels ont la possibilité de recharger chez eux), et que pour les trajets du quotidien, en moyenne, plus de 9 jours sur 10, la question de l’autonomie ne se pose pas avec un véhicule électrique.Il ne se pose que lorsque l’on parcours plus de 300 kilomètres dans la journée. Combien de fois par an, un conducteur moyen fait-il plus de 300 kilomètres dans la même journée? 10 jours sur 365? Combien de foyers en France possèdent 2 voitures? Si l’une est thermique et l’autre électrique…
Ce n’est qu’avec l’expérience, le bouche à oreille, que les futures acheteurs potentiels finiront par comprendre que l’autonomie et la recharge ne sont pas un problème (sauf si l’on part en vacance le week-end du 1er aout).
Concernant le prix, les prix moyens d’un VE en Chine sont nettement inférieurs au prix moyen en Europe. Les prix élevés européens reflètent surtout le manque de capacité de production des constructeurs européens, leurs couts élevés du fait des faibles volumes de production, et leur ciblage des véhicules haut de gamme. Par ailleurs; le prix de VE sont en baisse constante, le prix du KWh de batterie baissant sans cesse, et les économies de conception et d’échelle faisant le reste. Ce n’est qu’une question de quelques années pour que le prix d’achat d’un VE soit inférieur à celui d’un VT. Certains véhicules chinois, tel la MG4 standard à 30 000 Euros avant bonus, et 25 000 Euros après bonus, sont déjà moins chères que leurs équivalent thermiques.
Avec le bouche à oreille, le publique finira par savoir qu’un VE est beaucoup moins chère à l’usage, beaucoup moins chère en entretien, intrinsèquement plus fiable, plus durable et beaucoup plus agréable à conduire. Comme il sera bientôt aussi moins chère à l’achat…
Ce que l’article et les études oublient d’évoquer c’est que dors et déjà ce sont les classes les plus aisées qui achètent des véhicules thermiques neufs. Les jeunes, les classes populaires achètent des voitures d’occasion. Le problème du prix des véhicules neufs existe depuis longtemps déjà sur les véhicules thermiques. Il existe déjà sur le marché Chinois des véhicules électriques au prix d’une Dacia Sandero.
On continue à assister à des campagnes de désinformation de la part des constructeurs traditionnels. Renault a persuadé les Français qu’il fallait installer une station de recharge chez soi si l’on achetait un VE ce qui est faux; il suffit d’une prise domestique standard. Les allemands veulent nous persuader qu’il nous faut un VE avec une énorme batterie et 600 Km d’autonomie. Le conducteur moyen parcoure 30 Km par jour.
D’après data.enedis.fr, au 4e trimestre 2022 on avait 82107 (6 %) points de charges publics, 688060 (54 %) chez les particuliers, 493648 (39%) dans les sociétés.Il y a environ 700000 véhicules électriques actuellement en circulation en France. Personnellement je fais 25000 km par an et je n’ai utilisé que deux fois le réseau public chaque année. Est ce que je suis une exception ? D’après Enedis BVA 2021 : 89 % des recharges sont effectués sur des points privés (56 % des français vivent en maison individuelle).
Pour les stations service « essence » il en reste environ 11000 sur toute la France (100000 pompes ?) pour 45 millions de véhicules thermiques en circulation actuellement.
Au stade actuel du développement de la vente de véhicules électriques le nombre de points de recharge public est cohérent.
Je pense qu’il faudrait développer le service (aide ou assistance « humaine » plus accessible devant une borne), uniformiser le moyen de paiement et favoriser le partage de recharges privées.
Plutôt qu’utiliser le revenu moyen par rapport au pourcentage de VE, il aurait été plus judicieux d’utiliser le revenu médian. Dans certains pays le revenu moyen est « tiré vers le haut » par quelques (très) grandes fortunes.
Bon à savoir :
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’ACEA n’a jamais eu de position pro VE, mais plutôt l’inverse et presque systématiquement.
Donc s’il y a des chiffres, des data et des arguments contre, l’ACEA pourra vous les fournir.
Les autres données, celles qui sont pour le VE, elle aura plus de mal.
Ancien patron de cette association (une parmi d’autres) : Tavares. Tout est dit.
« Les décideurs doivent maintenant agir en établissant des conditions favorables »
Ils ne peuvent pas agir ou que très peu sur les revenus, ils ont d’autres leviers.
Sinon, bonne publication de l’ACEA.
Pour juger de l’impact CO2 (puisque c’est l’objectif principal), il faut aussi mettre en relation la part de VE vendus avec le nombre de véhicules vendus toutes motorisations confondues (TMC) dans chaque pays. BEV en 2022 ; part / nombre / revenu :
Les plus grosses parts :
Norvège 79% 215.000 43.000€
Royaume-Uni 44% 417.000 34.000€
Islande 33% 16.000 38.000€
Suède 33% 290.000 35.500€
Les plus grosses flottes :
Allemagne 18% 2.650.00 33.000€
France 13% 1.500.000 29.000€
Italie 4% 1.300.000 23.000€
Espagne 4% 810.000 21.700€
Allemagne + France c’est 41% 4.180.000 des véhicules immatriculés TMC par an en Europe.
Italie + Espagne, c’est 21% 2.130.000.
Les 26 autres de l’Europe c’est 37% 3.800.000.
Si on regarde le rapport part BEV / revenu :
La Roumanie est championne, suivie par le Portugal. L’Italie et l’Espagne sont très loin.
Et à 2 euros le litre d’essence, ce n’est pas assez cher ?
Pourtant, un VE est amplement suffisant pour un usage quotidien.
L’autonomie c’est comme l’argent : C’est pas un problème quand on en a.
Quand on a un VE qui a 500km WLTP c’est facile de dire que l’autonomie ne sert à rien.
Aujourd’hui si je devais choisir une spring ou une e-208 en véhicule principal je ne roulerais certainement pas en VE…
Attention à la comparaison entre le x6 et le x17 avec en référence 2016. Quand on part de presque zéro, la multiplication amplifie le bruit de fond et peut rendre les comparaisons non significatives. Ce qui compte avant tout, c’est d’abord le maillage du territoire, puis, quand il est fait, sa densification afin de limiter les risques de ne pas trouver de borne libre. Cela se mesure et s’évalue. Il est acceptable d’avoir des délais certains jours « de grands départs ». On ne peut pas tout dimensionner pour l’exceptionnel. C’est aussi à chacun de réfléchir à ses vacances pour éviter de partir et revenir le même jour que tout le monde.
Cela prouve aussi que le carburant n’est pas assez cher, y compris (ou surtout?) en Europe de l’Est.
C’est vrai que les gens comparent les avantages et inconvénients (perçus). En taxant plus le carburant on augmente facilement l’inconvénient des fumantes, ce qui influe sur les choix.
Choix qui d’ailleurs pourraient aussi en partie retomber sur les TC, le vélo, le covoiturage etc…
On va dans le mur. Ce n’est pas en garantissant à tous le confort pas cher d’une voiture à pétrole qu’on va les inciter à faire l’effort de changer leurs habitudes.